Recul historique pour l’agriculture bio en Grand Est

Après avoir multiplié ses effectifs par 3 en 10 ans, l’agriculture biologique marque le pas. Depuis 2024 ses effectifs décroissent en Grand Est, dans l’indifférence des pouvoirs publics.
Avec 154 nouvelles fermes en 2024 pour 217 cessations, pour la première fois notre région a vu la bio reculer, en termes de nombre de fermes, mais plus encore en matière de surface cultivée car les arrêts se font en grande culture et on s’installe en viticulture et en maraîchage, sur de plus petites surfaces. La bio c’est aujourd’hui 10 % des fermes et 8 % de la surface agricole utile de notre région.
Certains départements comme l’Aube et les Ardennes connaissent une véritable hémorragie. Dans les Ardennes on comptabilise 28 interruptions pour 3 conversions en 2024. Si quelques arrêts sont le fait de producteurs de luzerne, ils concernent aussi et surtout les producteurs laitiers. Laurent Cousin, ex-président de Bio Grand Est et producteur de lait en Thiérache ardennaise, disait il y a quelques mois écouler les 2/3 de sa production dans la filière conventionnelle, faute de débouchés en bio ; il craint aujourd’hui des déconversions nombreuses.
Pourtant le même Laurent Cousin nous indiquait que les problèmes de la filière seraient en partie résolus si les pouvoirs publics jouaient pleinement leur rôle...
Un désengagement de l’État et de la Région
La loi EGALIM en particulier, votée en 2018, impose aux collectivités d’introduire 20 % de produits bios dans la restauration collective. La Région en est loin, arrivant péniblement à 9 % de bio dans les cantines des lycées, soit moins que ce qui était pratiqué en 2015 en Champagne-Ardenne. Les crédits consacrés à l’introduction de la bio dans les cantines des lycées furent alors supprimés à l’avènement du Grand Est, pour être rétablis récemment, 10 ans de perdus....
L’État a abandonné l’aide au maintien en 2018 en agriculture biologique, aide qui consistait en un paiement pour services environnementaux pendant les 5 ans qui suivaient les cinq premières années de l’aide à la conversion. Aide à la conversion dont le plafond fut baissé de 20 % par la Région en 2020 devant le boom de la bio ! La même Région a supprimé l’aide à la certification bio alors qu’elle verse une aide à la certification pour des labels beaucoup moins exigeants qu’elle promeut, affaiblissant d’autant l’agriculture bio.
Pourtant les aides sont nécessaires si l’on veut atteindre les 14 % des fermes bio en Grand Est en 2027 et les 30 % des surfaces agricoles en France en 2030 prévues par la loi ; rappelons que ces objectifs ont été fixés en raison des aménités de l’agriculture bio pour la santé publique, la qualité de l’eau et des sols. Si le projet a changé il faudra que l’ État et la Région le disent !
Christophe Dumont